Ce que ça nous dit...
... demande Kozlika. Elle n’aurait pas pu choisir un morceau plus significatif pour moi que le Prélude de la première suite pour violoncelle de Bach.
Les six suites pour violoncelle, cela fait partie de mon enfance. C’est mon père qui m’appelle dans le salon, avec le célèbre enregistrement mono de Pablo Casals de la sixième suite, ou parfois la cinquième, sur le tourne-disque. Le discours paternel est ponctué par la question si cela me plaît. Et moi, ce n’est pas que je n’aime pas, mais c’est très ardu ; je me sens comme tombée dans une conférence sur les compléments circonstanciels en veux persan, et à dix ans, on a de légers problèmes de compréhension. Je fais donc semblante d’aimer, et avec le temps je m’habitue.
Et en dépit de mon manque de musicalité que mon père me jettait comme une tare à ses mauvais moments, à force de m’épanouir dans la chorale de mon école, le déclic s’est produit un jour : soudain je «pige» Bach ; et je le kiffe grave. Cela devient de la musique sacrée pour moi, plus sacrée que celle qui s’affiche comme telle.
Puis, le Prélude et le Menuet I de la Suite n° 1 BWV 1007, c’est le summum de ce que j’ai jamais joué moi-même au violoncelle. Instrument que je n’ai plus touché depuis près de huit ans. Mais qui a mon amour. Comment pouvait-il en être autrement, étant donné que c’est l’instrument le plus sexy de tous ? En fait, «jouer», ça ne veut pas dire «pour faire écouter» ! Noooooon—c’était imbuvable pour toute personne qui n’était pas moi (ou mon prof de violoncelle, à la limite, qui était payé pour) ! C’était juste que j’étais capable de commencer au début et arriver à la fin – c’est comme traverser Paris en voiture… pas de prétention ! Mais quel bonheur de jouer ça !
Ensuite, c’est Pierre Fournier chez Koz. Ben, Fournier est sans aucun doute un grand violoncelliste, mais avec Misha Maisky il appartient à une école qui n’a pas ma préférence. Trop convexe, le son ; trop égocentrique ; des ritardandos où j’en vois pas. Et pour Bach, pour tout Bach, même ses morceaux faciles (les inventions à deux voix, par exemple), le truc est que tout tient ensemble du début à la fin. Quand on joue la dernière note, il faut se rappeler comment on a joué la première—c’est un tout cohérent qui ne se découpe pas en passages à aligner. Et ça aussi, Fournier ne le respecte pas.
Donc qui ? Je garde en mémoire l’éblouissement que j’ai ressenti en écoutant Truls Mørk à la radio une fois. En général, je suis fan de Rostropovich—il est absolument top top top dans le Quatuor pour la fin du temps de Messiaen et pour tout le répertoire du romantisme allemand—mais force est de constater que si Fournier démarre comme un éléphant, Rostropovich, lui, attaque comme un bûcheron :
Non, vraiment, j’ai entendu mieux. Je préfère presque Fournier. Ceci dit, dans le Prélude de la quatrième suite, l’interprétation de Rostropovich n’est pas aussi mauvaise que ça (!!! sacrilège !!!) :
Je vous présenterais bien d’autres, mais Rostro est le seul que j’ai en format numérique. J’ai réduit la qualité (donc cela ne remplace nullement l’achat du CD...). [Dites-moi si ça marche pour dewplayer—c’est la première fois que je l’utilise.]
[Appris au vérificateur d’orthographe : ritardando (non, ce n’est pas s’attardant, même si le mot signifie cela plus ou moins, et il s’appelle vraiment Rostropovich en transcription latine, et pas Qu’apostrophai.)]
Le dewplayer marche impec depuis ma config en tout cas (Mac / Firefox).
Rostro… non, c’est trop rapide, trop pressé pour moi, j’ai l’impression qu’il cherche à s’en débarrasser.
Impec chez moi (FF/PC & IE/PC)
Je n’aime pas non plus vraiment la version de Rostro, ni celle de Yoy-Yo Ma, qui sont pourtant les violoncellistes que je rpéfère par dessus tout (oui, je suis pas très original).
J’aime beaucoup celle d’Anner Bylsma ou, différemment, celle de Janos Starker.